"Arkady Strugatsky, Boris Strugatsky. Traduit du russe (Фр.)" - читать интересную книгу автора

scrupuleusement Б la chronologie, il raconta l'histoire de sa vie
sexuelle d'annКe en annКe, mois aprЙs mois. La cuisiniЙre du camp de
concentration oЭ il avait КtК enfermК pour avoir volК du papier au temps
de la pКnurie (la cuisiniЙre rКpКtait
toujours : "Fais attention, Touzik, ne me joue pas de tour!..."), la
fille d'un dКtenu politique dans ce mЛme camp (elle ne se souciait pas de
savoir avec qui elle allait, elle Кtait persuadКe que de toute faЪon elle
finirait au crКmatoire), la
femme d'un marin dans une ville portuaire, qui tentait ainsi de se
venger des trahisons incessantes de son taureau de mari. Il y avait aussi
une riche veuve que Touzik avait fini par fuir une nuit, en caleЪon, parce
qu'elle voulait mettre le grappin
sur le pauvre Touzik et lui faire faire le trafic de narcotiques et
de prКparations mКdicales douteuses. Et les femmes qu'il transportait
quand il Кtait chauffeur de taxi : elles le payaient avec l'argent du
client, puis, Б la fin de la nuit, en
nature. ("... Alors je lui dis : mais enfin, et Б moi, qui va y
penser? Toi tu en as dКjБ eu quatre, et moi pas une...") Puis sa femme,
une fillette d'une quinzaine d'annКes, qu'il avait КpousКe par
autorisation spКciale des autoritКs : elle lui
avait donnК des jumeaux et avait fini par le quitter quand il avait
essayК de la prЛter Б des amis en Кchange de leurs maПtresses. Des
femmes... des filles... des harpies... des salopes... des traПnКes...
- C'est pour Ъa que je suis pas du tout un dКpravК, conclut-il. Je
suis simplement un homme qui a du tempКrament, et pas une espЙce de dКbile
impuissant.
Il finit son alcool, ramassa les dossiers et partit sans prendre
congК en sifflotant et en faisant grincer le parquet, curieusement voЩtК,
soudain semblable Б une araignКe ou Б un homme des cavernes. Perets,
accablК, le suivait encore des yeux
quand Alevtina lui dit :
- Donnez-moi la main, Pertchik.
Elle s'assit sur la derniЙre marche, posa les mains sur ses
Кpaules et se laissa tomber avec un petit cri. Il l'attrapa sous les
aisselles et la posa Б terre, et ils demeurЙrent un instant tout proches
l'un de l'autre, visage contre visage. Elle
avait gardК les mains posКes sur ses Кpaules, et il la tenait
toujours sous les aisselles.
- On m'a chassК de l'hЖtel, dit-il.
- Je sais, dit-elle. Allons chez moi, si vous voulez?
Elle Кtait bonne et tiЙde, et elle affrontait tranquillement son
regard, mais sans aucune assurance particuliЙre. En la regardant, on
pouvait se reprКsenter bien des images de bontК, de chaleur, de douceur,
et Perets passa avidement en revue
toutes ces images les unes aprЙs les autres, essaya de se voir tout
contre elle, mais comprit tout d'un coup qu'il ne pouvait pas : Б sa place
il voyait Touzik, un Touzik beau, arrogant, aux gestes sЩrs, et qui
sentait des pieds.
- Non, merci, dit-il en retirant ses mains... Je m'arrangerai
comme Ъa.